lundi 17 décembre 2012

Article sur Sud Ouest..


Publié le 09/08/2012 à 06h00
Par emmanuelle chiron
Saintes

Le tatouage trace sa route

Entre les deux, le cœur du tatouage balance. Avant le passage à l'acte, le geste est plus réfléchi que l'on ne le croit et, souvent, il aide à la reconstruction de soi.


Valère a débuté grâce à « Thierry L'Orange » en Charente. « Il m'a cédé sa boutique, c'est lui qui m'a lancé. À l'époque, il valait mieux commencer dans les pas d'un autre », confie-t-il. (ph. dr)

Valère est italien. Chez lui, le cliché qui colle aux basques des Latins n'en est pas un : il parle tout le temps. Et quand on le lance sur sa passion, l'art du tatouage, il ne s'arrête plus. Le sujet est assez vaste pour contenir tout le débit de Valère. Entre les images négatives d'hier à l'effet mode d'aujourd'hui, beaucoup pensent avoir tout vu et tout entendu sur le tatouage. Il reste cependant des subtilités qui nous échappent.
Valère Prosperi flirte avec les encres depuis treize ans. Sa première boutique, il l'a ouverte à Angoulême en 1999. « Le 19 mai 1999, ça faisait beaucoup de neuf », se rappelle-t-il. Il y a six ans, il est venu s'établir à Saintes avec une deuxième boutique Valère Tattoo. Une installation sur la pointe des pieds.
« À cette époque, dans la région, nous étions quatre-cinq tatoueurs maxi. Chacun s'annonçait quand il arrivait sur le territoire de l'autre. La concurrence négative, je ne connais pas. »
La société marche bien, « je n'ai pas à me plaindre », constate Valère. Mais ce n'est pas une raison pour s'endormir sur ses lauriers. L'univers du tatouage évolue perpétuellement. Après avoir passé les doutes quant aux règles d'hygiène, un autre combat agite le syndicat national des tatoueurs : faire accepter le tatouage comme un art à part entière.
« Moi, j'ai un peu de mal à parler d'art, je préfère me considérer comme un artisan, raconte Valère. Mais aujourd'hui, les professionnels ont tous suivi une formation graphique. Le syndicat se bat pour une reconnaissance artistique. »
Chez Valère, les deux personnes qui officient aujourd'hui, Julien au tatouage et Alex pour le piercing, sont des « collaborateurs ». « J'ai voulu instaurer une formation à l'image du compagnonnage, précise Valère. Ils vont et viennent et se perfectionnent dans différents magasins, comme un grand collectif. » L'Italien a suivi, pendant deux ans, une formation aux Beaux-arts et il en a retenu une leçon. « Là-bas, on nous disait, "Levez-vous et apprenez de ce que font vos voisins". Observer l'autre n'est pas copier, mais apprendre de lui. »
Le « tattoo » est donc en passe de devenir, si ne l'était déjà dans les esprits, un art à part entière, mais il est difficile de le résumer seulement ainsi.
Une autre partie du tatouage s'est développée au fil des années, une partie dite « médicale ».
Julien en a eu récemment l'expérience. « Une de mes clientes avait l'avant-bras brûlé suite à un accident. Dans son métier, elle doit montrer ses bras et elle ne l'acceptait plus. Nous avons travaillé avec elle en imaginant un tatouage qui rappellerait l'art de l'application du henné sur la peau. » De même, une femme d'une soixantaine d'années a franchi le seuil de Valère Tattoo. Une première pour l'équipe. « Ce sont ses médecins qui l'ont orientée vers nous », explique le propriétaire des lieux. Cette cliente particulière avait subi une ablation du sein. Après une reconstitution mammaire, il lui manquait encore un détail pour se retrouver à nouveau en tant que femme. « Nous lui avons tatoué un mamelon pour parfaire la reconstitution, poursuit Valère. Je me souviens, elle a pleuré. Elle n'en revenait pas du résultat. »
La clientèle a évolué elle aussi. L'époque où, à 13 ans, Valère se faisait tatouer à l'encre de chine dans un squat est révolue. « Tout comme l'image du tatouage bon pour les voyous ! »
Une clientèle plus aisée, qui sait ce qu'elle veut, a émergé ces dernières années. « Mais le tatouage reste une sorte de passage, comme un rite. C'est là que nous intervenons, et ce n'est pas rien, confie Valère. Au moment du devis, l'échange avec le client est très important. Il doit se rendent bien compte que ce qu'il s'apprête à faire, il va le conserver toute sa vie ! »
Valère Tattoo, 36, rue Alsace-Lorraine. Jusqu'au 29 septembre, les photographies de Milloou sont à découvrir. Valère est aussi peintre et expose ses toiles dans sa boutique d'Angoulême, jusqu'au 10 septembre. Informations sur www.valeretattoo.com


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